Le réchauffement climatique et après…

Le réchauffement est incontestablement l’un des enjeux essentiels de ce début de 21e siècle. Les ressorts du climat sont cependant capricieux et personne ne peut prétendre savoir comment la situation va évoluer. Cela n’empêche pas de spéculer, sérieusement ou non, sur ce que sera notre avenir ; sur la manière dont l’Homme devra faire face aux nouvelles réalités.

            Une quinzaine d’auteurs francophones se sont penchés sur ce thème particulièrement riche. Ils se projettent dans des futurs plus ou moins lointains sur des modes réalistes, humoristiques ou poétiques, dressant un tableau très surprenant et parfois paradoxal de ce qui attend l’humanité.

Yann QUERO

Le réchauffement climatique et après…

Arkuiris – 2014 – 220 pages

 

Modes réalistes ? Nouvelles imaginatives ?

Sûrement pas ! Modes catastrophistes et reprenant tous les poncifs éculés de la nouvelle religion dogmatique, assurément, alimentée (?) par des informations bas de gamme et sans croisement des connaissances !

Bien sûr, toutes les nouvelles sont « développement durable », pleines de considérations négatives sur les perspectives de vie sur Terre, empreinte du discours renvoyant sans cesse l’évolution du climat à une « faute » de l’homo sapiens et donc nécessité de punition en retour, de rédemption, etc.

 

La nouvelle qui débute p.63 « La dernière reine » est édifiante puisque nous sont présentés des êtres humains réduits à une économie de subsistance drastique… et quand la nuit tombe, leurs travaux harassants dans les champs sont « éclairés par de puissants spots » !

La nouvelle « 2073, l’année de la pluie » comporte aussi son pesant d’incongruité. Ainsi, p.74 les produits consommés en Finistère n’ont pas changé : Kig ha Fars, langoustes à l’armoricaine, galettes, crêpes dentelles, Kouing aman… le tout au son du biniou et de la bombarde. Quelle imagination ! Et p.79, nous apprenons que le prix du baril d’eau a atteint 1300 euros (sic, avec un « s », alors que le terme est invariable).

 

Seule la nouvelle débutant p.107 « Mon cœur pleure Léda » semble avoir échappé au catastrophisme prophétique en commençant par énoncer la venue d’une Nouvelle Glaciation. « Quel pourvoir assez titanesque aurait été capable d’enclencher la N.G. ? » s’interroge l’auteur. Et plus loin « la Terre semble décider à faire disparaître [l’homme prétentieux] qui prétendait dominer la Nature ».

Bah, oui, c’est exactement ce que démontrent – preuves à l’appui le climato-critiques actuels : l’homme est minuscule en face des forces telluriques qui se moquent pas mal de sa présence… et il est bien incapable d’avoir modifié quelque climat que ce soit, ce qui ne veut pas dire qu’il faut gaspiller l’eau, l’énergie, les matières premières…etc… C’est la pédagogie de l’intelligence versus doctrine de la peur.

 

Renvois :

 

¤ François GERVAIS, L’innocence du carbone – FW N°49.

¤ Gérald BRONNER, La Planète des hommes (Ré-enchanter le risque) – FW-N°54.

¤ « Anthropocène ou anthropophobie ? – FW N°54.

 

LF

 

 

 

Les médias sont en crise. Pas seulement la presse écrite, mais toute la chaîne de production de l’information. Confrontés à une concurrence croissante et à une baisse inexorable des recettes publicitaires, les journaux, les radios, les télévisions, les pure players sont tous à la recherche d’une nouveau modèle. Fondé sur une étude des médias en Europe et aux USA, ce livre propose de créer un nouveau statut de « société de média à but non lucratif », intermédiaire entre le statut de fondation et celui de société par actions. Ce statut permettrait d’œuvrer pour des médias indépendants des actionnaires extérieurs, des annonceurs et des pouvoirs publics, mais dépendants de leurs lecteurs, de leurs salariés et des internautes. Il s’agit d’un modèle économique adapté à la révolution numérique et aux enjeux du 21e siècle. Le débat est ouvert : il en va tout simplement de l’avenir de notre démocratie.

 

 

Julia CAGE

Sauver les médias

Seuil – 2015 – 120 pages

 

L’auteur rappelle fort à propos la déontologie du journalisme tel que définie selon la charte d’éthique professionnelle (SNJ) : « Le journalisme consiste à rechercher, vérifier, situer dans son contexte, hiérarchiser, mettre en forme, commenter et publier une information de qualité. » Le moins qu’on puisse dire, c’est que, dans la presse française, le respect de cette déontologie est bien faible.

JC aurait pu ajouter le principe d’origine du journalisme anglo-saxon « Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres. » Les faits……

Plus loin, elle affirme péremptoirement que « le papier est sans doute appelé à disparaître… ». Rien n’est moins sûr. Elle confond remplacement et sédimentation, et ignore visiblement une des caractéristiques majeures de l’Ere de l’Information, la culture du « ET ».

Et, curieusement, à aucun moment elle ne cite la réussite formidable de la revue XXI, revue de contenus documentés et sans publicité.

 

P.57 elle aborde la question du nombre de médias que peut supporter un marché, en reconnaissant que c’est très compliqué et relève de nombreux paramètres. Elle réfute le fait que le monopole soit une solution satisfaisante, mais écrit aussi que toujours plus de médias ce n’est pas forcément toujours mieux ; et défend la position que ce serait une erreur de chercher la solution à la crise des médias dans la multiplication du nombre d’acteurs médiatiques. Elle signale que, dans la période actuelle, le média papier est celui qui « consomme » le plus long temps de lecture, à rebours des médias audiovisuels (passifs) qui ne sont pas regardés avec autant d’attention. Ainsi, pour mettre en parallèle le journal papier et son site Web, elle donne les chiffres suivants : le temps moyen mensuel passé par personne sur les sites d’actualité est de 54mn tandis que la lecture d’un journal imprimé dure entre 25 et 35mn… chaque jour.

 

Afin de pouvoir structurer sa proposition finale, elle fournit des données relatives aux aides à la presse, nombreuses, compliqués voire contradictoires, en France. Les aides revêtent des aspects divers, tarifs postaux préférentiels, subventions, aides à la modernisation, TVA réduite, aides au portage, etc. Et ceci indifféremment. Il est alors logique de constaté qu’en Suède les aides concernent 134 titres (dont 87 journaux quotidiens) tandis qu’en France nous atteignons le chiffre de 9000 titres aidés, dont 400 au maximum peuvent estimer correspondre à des productions relevant de la presse d’information politique et générale. Ainsi, du fait de l’importance de la seule aide postale, on trouve parmi les 200 titres les plus aidés dix magazines de télévision, dont cinq parmi les vingt-cinq publications les plus aidées.

 

 

Pour Julia Cagé, une première réforme des aides à la presse devrait donc consister à remplacer le système actuel de subventions diverses, trop compliqué et aux objectifs contradictoires, par un système plus simple et plus automatique, avec le versement de subventions en pourcentage que chiffre d’affaires ou de la circulation des journaux. Ce système ne serait destiné qu’aux seuls journaux d’information politique et générale, ce qui en réduirait considérablement le coût pour l’Etat (# 450 M€ en 2012).

 

A partir de la p.98, JG s’applique à formuler sa proposition de «  société de média à but non lucratif ». Elle montre que c’est un modèle hybride. Il s’inspire en partie du modèle des grandes universités internationales, conciliant activité commerciale et non – lucrativité ; mais il ne s’y résume pas. Il s’agit de sécuriser le financement des acteurs médiatiques en gelant leur capital, et d’encadrer le pouvoir décisionnel des actionnaires extérieurs par la rédaction de statuts contraignants, afin de reprendre le contrôle de notre propre destin (rien que ça…) : Capitalisme, crowdfunding, démocratie.

 

Le reproche majeur fait au livre de Julia Cagé est qu’elle n’aborde jamais la question de fond : pourquoi la presse écrite française se porte-t-elle mal alors qu’elle est florissante (quotidiens et hebdomadaires d’information) en Nord-Europe, en Suisse, au Japon, en Israël … ? Elle laisse de côté la nature, la qualité, la documentation … des contenus, alors que c’est souvent la marge inintéressante qui est, trop souvent et de manière récurrente, mise en avant.

Parce que la grande majorité des journalistes français met en avant ses propres croyances ou idéologies pour présenter une fait avant de préciser, de vérifier, de contextualiser le dit fait. C’est particulièrement flagrant dans les médias audio (le cas de la télévision est encore plus catastrophique, l’image isolée étant sensée résumer à elle toute seule une problématique nécessitant de longs développements et analyses documentées ; exception EuroNews). Malheureusement, nous le retrouvons aussi dans les médias papier ; l’exemple du quotidien Le Monde étant quasiment emblématique de cette crise ; alors qu’il tirait à 550 000 exemplaires il y a encore vingt ans, il est rendu à 200 000, tandis que la population française augmentait de six millions d’âmes dans le même temps.

 

Je laisse la conclusion (provisoire) à Richard Feynman, Prix Nobel de Physique en 1965 :

« Les journalistes et les commentateurs de la presse écrite présupposent en majorité que le public est plus bête qu’eux et qu’il est donc incapable de comprendre ce qu’eux-mêmes ne comprennent pas ; or, c’est un présupposé grotesque. Je n’insinue pas ici que les membres de la profession journalistique seraient plus sots que Monsieur Tout Le Monde, je veux simplement dire qu’ils sont à certains égards plus bouchés que bon nombre de ceux qui n’exercent pas cette profession. »

 

Renvois :

 

¤ Philippe COULANGEON, Sociologie des pratiques culturelles – FW N°19.

¤ Frédéric MARTEL, Mainstream / Industries culturelles mondiales – FW N°37.

¤ Michel CLAESSENS, Science et communication – FW N°38.

¤ Ignacio ROMANET, De l’explosion du journalisme – FW N°41.

¤ Gilles ROUET, Usages politiques des nouveaux médias – FW N°46.

¤ Stuart FIRENSTEIN, Les continents de l’ignorance – FW N°54   .

 

 

LF