À la recherche de l’Univers invisible

Après ses  stupéfiantes  avancées  du 20e  siècle – la découverte de l’expansion de l’Univers, du Big Bang et des trous noirs -, la cosmologie serait-elle en train de perdre son objet d’étude ? L’avènement de la « matière noire », invisible mais nécessaire pour expliquer  les mouvements des galaxies, celui de « l’énergie noire », insaisissable mais indispensable pour rendre compte de l’accélération de l’expansion de l’Univers, et celui des trous noirs, qui font apparaître la matière ordinaire comme un lapin dans un chapeau de magicien, donnent l’image d’un Univers élusif dont une part grandissante échappe à l’observation.

L’auteur fait la lumière sur le « triolet noir de notre ignorance » et cherche les biais susceptibles de dérober l’Univers à notre regard, en analysant les cinq « illusions » possibles.

David ELBAZ

Odile Jacob – 2016 – 200 pages

L’observation par le satellite Hubble d’un point de la voûte céleste n’est pas plus grand qu’une pointe de stylo tenue à bout de bras révéla la présence 5 500 galaxies, chacune peuplée d’environ 100 milliards d’étoiles. Cette image offre à la communauté  scientifique le plus grand livre ouvert sur l’histoire de la naissance, de la vie et de la mort des galaxies. En rapportant le bout de ciel à l’ensemble de la voûte céleste, on estime qu’il existe près de 100 milliards de galaxies dans l’Univers observable et donc au moins 10 000 milliards de milliards [1022] d’étoiles.

Par une amusante  coïncidence, le cerveau humain possède lui aussi environ 100 milliards de neurones, grâce auxquels il observe l’Univers et compte les étoiles et les galaxies……

D.E. rappelle fort justement qu’il existe deux grandes sources d’énergies dans l’Univers : la fusion nucléaire et l’énergie gravitationnelle ; et contrairement aux idées reçues, la seconde possède une plus grande efficacité que la première.

 

Supernova et superstition.

Les archives chinoises permettent de calculer le moment de l’explosion d’une supernova et la vitesse de son déploiement dans l’espace interstellaire. L’étoile à l’origine de la nébuleuse du Crabe explosa en 5146 avant notre ère. Sa lumière  voyagea pendant  6200 ans dans l’espace avant que la rétine de l’œil de Yang Wei-Te [astronome chinois qui observa la nouvelle étoile le 04 Juillet 1054] n’en collecte une petite partie. Pourquoi aucun texte occidental ne fait-il référence à cette étoile pourtant visible en plein jour ? En raison d’un ciel particulièrement gris ou d’abrutis sphériques – formule de l’astrophysicien Franck Zwicky – , c’est-à-dire des individus persuadés que rien ne peut apparaître sur la voûte céleste qui appartient au royaume éternel et immuable de Dieu ?

La théorie de l’inflation initiale de l’Univers reste aujourd’hui une hypothèse car il faudrait remonter aux premiers instants qui suivirent le Big Bang pour en avoir la confirmation formelle.

L’univers subit actuellement une nouvelle phase d’inflation. Un processus de croissance exponentielle de l’espace qui vient du fait que plus l’espace grandit à l’intérieur de notre horizon cosmologique, plus il existe de volume de vide et don d’énergie qui le pousse à s’étendre.

L’énergie noire se comporte comme imaginée par Alan Guth et que l’on appela « Inflaton », à défaut de connaître la nature de ce qui provoqua la première inflation.

La question des ondes gravitationnelles reste entière, bien qu’elle ait eu un début de réponse  en Septembre  2015 – observation non totalement  confirmée. Néanmoins, ce qui est acquis c’est l’existence de trous noirs de 30 masses solaires, que ces objets puissent vivre en couple, et qu’ils puissent fusionner.

Par ailleurs, un trou noir de 1  Gt, la masse d’une montagne, mesurerait la taille d’un proton – un femtomètre – et pourrait jouer le rôle de « particule de matière noire ».

L’accrétion de matière par un trou noir représente la plus puissante source d’énergie de l’Univers, sa « puissance  noire  ». Tant qu’il reste de la matière au voisinage d’un trou noir galactique, le noyau reste actif. Une fois le repas terminé, le noyau actif se transforme en noyau passif : un trou  noir  dormant, tel que celui qui occupe le centre de la Voie Lactée.

Tout porte à croire que ce trou noir se repose après un bon repas au cours duquel il a

dévoré la totalité de la matière se trouvant dans sa sphère d’influence.

 

Symétrie troublante.

La charge électrique du proton vaut exactement celle de l’électron. Pourtant, un proton pèse 1836 fois plus qu’un électron  ! Sans l’existence de cette symétrie parfaite entre les charges

+1 et -1, aucune galaxie, aucune étoile, aucune planète et aucune forme de vie n’existeraient, car s’ils ne se combinent pas pour former des atomes neutres, les protons se repoussent. La répulsion électrostatique entre deux protons dépasse d’un facteur 1036 leur attraction gravitationnelle. L’annihilation de la répulsion électrique entre protons résulte de la symétrie parfaite qui existe entre les charges des particules.

« Il semble trop tôt pour conclure que les trous noirs constituent la clé de nos énigmes. L’idée de faire appel à des micro-trous noirs pour expliquer la matière noire, et à un trou noir cosmique pour rendre compte de l’énergie noire, semble bien séduisante, mais elle repose sur trop d’hypothèses non justifiées…… »

À suivre…

 

Renvois

  • Richard FEYNMAN, Trois conférences du physicien Nobel 1965 FW N°28.
  • Peter ATKINS, Les 4 grands principes qui régissent l’Univers FW N°39.
  • Étienne KLEIN, Discours sur l’origine de l’Univers FW N°39.
  • Freeman DYSON, La vie dans l’Univers FW N°40.
  • Brian GREENE, L’Univers élégant FW N°48.
  • Roger PENROSE, Les cycles du temps (Univers) FW N°55.
  • François COMBES, La matière noire ; clé de l’Univers ? FW N°60.

PhS