Les âges de l’humanité

Comment, quand et pourquoi le monde a t’il commencé ? Et quand touchera t’il à son terme ? Quel est au juste le rapport du temps et de l’infini ? Depuis toujours, les hommes ont cherché des réponses à ces interrogations : dans les traditions et révélations religieuses autrefois, dans les données de la science aujourd’hui. Qu’en est-il en particulier de la fin des temps, qu´annoncent toutes les Ecritures sacrées de l’humanité ? Autant de questions auxquelles cet ouvrage s’efforce de répondre.

En exposant les lois qui relient le monde moderne aux époques précédentes, et la situation de l’ère présente dans les cycles du temps universel, l’auteur illustre le rôle essentiel du temps. Il montre que celui-ci impose à la succession des événements ses propres normes, qui correspondent à des lois numériques. S’appuyant sur les conceptions platoniciennes de la création qui renvoient les réalités temporelles à leurs modèles intemporels, il souligne que seule la vie intérieur de l’homme le met en mesure de tenir la balance ente ces deux types de réalité objective.

Les doctrines cosmologiques traditionnelles convergeant toutes pour affirmer la capacité du temps universel à réaliser le mal, l’auteur indique comment échapper à son emprise par la connaissance qu’on peut en avoir. Dans cette optique, il se réfère à des sources chrétiennes, mais aussi non chrétiennes, pour illustrer l’universalité de la représentation cyclique du temps. Il examine aussi les évidentes analogies existant entre les conceptions métaphysiques du temps et la notion scientifique de l’entropie qu’il oppose à la mythologie scientiste de l’évolutionnisme.

Les deux mille dernières années sont analysées en terme de cosmologie traditionnelle, à l’aide de la science des nombres, afin de permettre le calcul de la position de notre époque dans l’ère à laquelle elle appartient. L’auteur arrive à la conclusion qu’il y a de fortes probabilités pour que son terme coïncide avec la fin des temps, les éléments qui militent en ce sens l’emportant largement sur ceux qui pourraient en faire douter. Ce faisant, il se livre à une critique sévère et salutaire du monde moderne, qui fait écho au règne de la quantité de René Guenon et en prolonge la réflexion.

Robert BOLTON
L’Harmattan – 2014 – 250 pages

Robert BOLTON s’intéresse ici au sens de l’Histoire, linéaire ou cyclique, à partir d´une réflexion ésotérique sur le temps et sur la loi métaphysique de l’entropie comme tendance naturelle des objets ou systèmes à la désorganisation, voire au chaos. Il défend dans son livre la théorie du créationnisme en faisant souvent référence à Dieu ou à la Bible ce qui peut heurter certains. Sa pensée, comme vous allez le voir, est pourtant intense, profonde et digne d’intérêt.

L’idée de progrès infini et donc de temps linéaire s’est développé dans l’euphorie des temps modernes en lien avec notre maitrise toujours plus forte de notre destin par des moyens matériels. Cette croyance, optimiste voire illusoire, en un progrès infini est de plus en plus remis en question. Elle est pourtant centrale dans la définition du Temps et donc dans le sens de la vie. Le déclin de l’idée de progrès nous laisse devant un grand vide idéologique. La nature avec les saisons ou la Bible nous propose une vision moins matérielle, plus pessimiste, plus cyclique du Temps. L’humanité évoluant de la perfection originelle jusqu’aux abimes de confusion qui s’achèvent avec l’apocalypse après laquelle est censée apparaitre une nouvelle terre, ce qui évoque plutôt la notion de cycle. Au delà du pessimisme ou de l’optimisme, l’auteur essaye de parvenir à une définition du temps qui transcende le progrès et la réaction, qui, de fait, bien souvent, ne sont que des projections.

 

Notre société est caractérisée par une déferlante inédite d’innovations et de nouveautés qui s’auto-neutralisent. Nous sommes dans un monde de micro-changement frénétique et perpétuel au sein d’une civilisation finalement statique. Toute modification est aujourd’hui contrecarrée par une autre avant d’avoir pu introduire une vraie différence. Il n’y a plus rien de permanent dans notre société si ce n’est cette frénésie mondiale du changement rapide donc stérile et futile qui bloquent toute vraie évolution. Le meilleur moyen de ne pas changer, c’est de changer tout le temps. Sans profondeur, notre société superficielle s’épuise de sa stérilité permanente. Tout dans la nature et dans l’homme suit un cycle tel que les marées, la croissance des arbres, les prix de l’immobilier ou le besoin de sommeil, rien ne serait donc linéaire à l’exception du temps reflet du progrès infini ou de la vie éternelle tant espéré par les hommes ? Le temps linéaire est une négation de l’intégration de l’humanité dans l’ordre naturel comme si nous n’en étions pas dépendants. L’activité humaine est pourtant conditionnée par les cycles cosmiques tel le mouvement de la Terre autour du Soleil qui provoque le jour et la nuit.

L’hypothèse du cycle induit l’idée, à partir d’un point haut, d’une descente puis d’une remontée jusqu’à ce point, c’est à dire une chute jusqu´à un point inférieur puis d´une renaissance qui permet de retrouver le point d’origine. Soit l’inverse, dans le cas d’un point originel bas, une montée suivi d’une chute pour retrouver ce point bas. Il y a donc tôt ou tard la nécessité d’une dégénérescence cosmique progressive à partir d’une norme originelle que beaucoup de traditions nomment la création divine parfaite de l’origine considérée par la tradition comme plutôt un point haut, idéal, qu’on ne peut pas dépasser. Il existe aussi l’éventualité de ne pas réussir a retrouver le point d’origine, les cycles successifs s’éloignant alors progressivement et inéluctablement de Dieu ou de l’état primordial (entropie croissante). Le créationnisme va plus loin en disant que tout état d’être en fait surgir, nécessairement, un autre plus limité, inférieur selon la conception de l’origine et de la descente. D’autres traditions évoquent simplement que l’ordre de l’existence permet à toutes les possibilités de se réaliser sans pour autant signifier une dévaluation de l’ensemble, toutes les possibilités font partie de l’Unité initiale. Ces possibilités initialement prévu par Dieu sont désirées par Dieu. Elles ne font qu´exprimer leurs potentialités afin de réaliser la plénitude de la réalisation. Ce principe de plénitude relie tous les niveaux de l’être de façon ordonnée, soit vers le « haut » soit vers le  » bas ».

Toute dégénérescence cosmique indique que le changement doit comporter une cause inhérente de dégradation entre la forme et la matière. Forme et matière sont les 2 pôles opposés de l’existence entre lesquels se déploie tout le spectacle du monde visible. Tout est concevable comme combinaison de ces deux causes universelles. La prédominance de forme amènera stabilité et unité, la prédominance de la matière impliquera confusion et instabilité avec des changements constants. C’est le cas de notre société acceptant tout et ne retenant rien. La marche du temps historique pourrait signifier soit un accroissement du principe de la forme (régénérescence) soit un accroissement du principe de la matière (dégénérescence). Le matérialisme ambiant apparait donc comme la conséquence de l’augmentation relative de la composante matérielle dans le microcosme.

Le cycle du temps manifeste une transition de simplicité de potentialité à une simplicité d’épuisement en passant par une abondance de complexité dans la phase intermédiaire, instituant ainsi une proximité voire une symétrie dans la simplicité entre le plus haut et le plus bas. Il y a donc 3 niveaux de complexité avec une symétrie entre le 1er et le 3eme. Les êtres créés tirent leur origine de l’union de la forme et de la matière qui est une union de la plénitude et du vide, de l’ordre et du chaos. Le temps relie la fin au commencement, et cela un nombre infini de fois ce qui permet permet d’équilibrer deux forces, l’éphémère et l´éternel, le changement et l’immuable. Dans le cas de l’être humain, cela concilie l’entropie, le changement destructeur au niveau individuel avec le maintien, malgré tout, de l´humanité, voire de la vie, à un niveau plus global.

Le temps cyclique unit l’immuable à un monde changeant, ce que ne fait pas le concept abstrait d’un temps rectiligne. Par son caractère répétitif, le temps cyclique serait un intermédiaire entre le changement permanent et l’immuable, l’éternité et le changement se combinant ainsi dans une structure dynamique. Toute cause faisant fonction de principe en chaque série communique à la série entière son propre caractère. Et ce que la cause est à titre primordial, la série le réalise selon le mode dégressif. Une cause initiale se propage ainsi jusqu’à l’épuisement de sa force. De même, le vieillissement d’un corps résulte de son obligation de faire sans cesse des copies de son modèle ADN, qui avec le temps, s’éloigne de plus en plus de son modèle initial selon une série dégressive.

L’âme Humaine est un univers en soi, véritable microcosme, en interaction harmonieuse ou pas avec l´univers macrocosme. La finalité de la vie est étroitement liée à cette union entre la personnalité individuelle et la réalité universelle. Les réalités spirituelles sont partie intégrante de la nature humaine : comme l’homme ne saurait cesser d’en avoir conscience, puisqu’elles appartiennent à son être même, il peut aisément prendre la présence de pures potentialités pour leur pleine actualisation…

Toute génération est une cause liée à celle qui lui succède et le propre de la causalité naturelle, selon l’auteur, est que l’effet est toujours inférieur à la cause, sinon la nature se créerait et perpétuerait elle-même. C’est la loi des effets en constante diminution dans chaque série causale dont se compose le temps. Cette loi affecte l’esprit humain.

Il y a deux lois dans la thermodynamique : selon la première, la quantité totale d’énergie et de matière dans l’univers est une quantité fixe qui peut être redistribuée mais ni créée ni détruite. Selon la seconde, chaque processus physique implique une « dédifférenciation », c’est à dire un accroissement irréversible du désordre, appelé entropie. Les forces naturelles ne peuvent produire que du désordre, en tant que perte de forme et séparation de matière. La quantité fixe de matière et d’énergie se fragmente constamment en quantité moindre et moins utilisable.

L’univers se déconcentre donc, il se dilue, se divise…Le désordre physique reste alors le plus probable avec une différenciation minimale entre ses parties, l’ordre et la différenciation étant avec cette loi des plus improbables. De la même façon, l’énergie se déconcentre. Il n’y a production d’énergie que s’il y a une différence entre une source chaude et une source froide. Quand il fait chaud dans une pièce et froid dans l’autre et qu’on enlève la cloison, Il y aura mouvement du chaud vers le froid et on obtiendra rapidement une température moyenne, perdant les caractéristiques de l’une et l’autre partie. Il en est de même dans l’univers, l’énergie, initialement concentrée en un point, a tendance à atteindre un niveau d’énergie moyen, de plus en plus dilué, dans un univers en expansion jusqu´a un point de non retour, stable dans le désordre, non différencié. On en arrivera à un moment ou tout sera alors identique, une même soupe de matière, avec une chaleur et une énergie identique partout dans l’univers, sans plus aucun échange thermique donc sans mouvement. C’est le sens de la matière, en sens unique. Robert BOLTON évoque ici un argument de l´existence de Dieu d’avoir initialement concentré la matière et l’énergie, ce que la nature ne peut pas faire elle-même…

La théorie de l’évolution s’oppose à l’entropie dans le sens ou elle évoque une augmentation de l’ordre et de la complexité sans fin, au point qu´a un moment toute créature, toute molécule serait dû à l’évolution. L’évolutionnisme, à l’opposé du créationnisme, aboutirait ainsi spontanément à ce qu’on pourrait appeler une création sans créateurs. L’évolution, en affirmant que, grâce à la vie, des structures plus complexes surgissent continuellement de structures moins complexes, s’oppose donc à la dégénérescence de la matière. La vie en concentrant la matière pour faire grandir un organisme lutte contre cette entropie. La vie rassemble ce qui est épars certes mais c’est au prix d’un gaspillage et d’une dissipation de l’organisation universelle. L’organisation nouvelle qui apparait dans les tissus en cours de croissance n’égale jamais la quantité d’organisation perdue dans les substances qui les nourrissent. Ne serait-ce que l’acheminement de la matière nutritive jusqu’à l’organisme demande beaucoup d´énergie. Pour Robert BOLTON, la vie en éparpillant plus de matière qu’elle n’en rassemble participe au final à l’entropie générale. Seul le mental ou l’esprit, étant hors de la matière, échappent à la loi de l’entropie. Pour autant, ils en subissent les influences.

Le temps nécessaire pour que l’Univers atteigne l’entropie maximale est très long. Pour autant, les civilisations progressent vers leurs entropies maximales beaucoup plus vite. L’entropie maximale est donc marquée par la non-différenciation, la confusion et l’épuisement des possibilités. C’est ce vers quoi tend notre civilisation. La différence permet l’existence et un affaiblissement de la qualité des choses représente une menace pour la pérennité de l’identité et de l’existence. L’uniformité et l’abolition des distinctions fragilisent notre perception de notre identité. Cette tendance à l’indifférenciation ou a l’égalisation ne réduit pas l’égo mais au contraire le renforce en nous fragilisant. La dilution et l’effacement de l’individualité ne fait que renforcer nos peurs et donc l’égo. L’affaiblissement des distinctions entre les différentes nations ne permet plus de régénérer les idées, l’absence d’identités ne permet plus de véritables changements et met donc en danger l’existence du monde par un affadissement généralisé. Les cultures s’homogénéisent. D’ailleurs, on peut constater que la réduction des différences à travers le monde ne garantit pas pour autant la paix souvent du fait de l’angoisse dû justement à la perte d’identité. Le processus d’uniformisation ne conduit pas à l’unité et génère donc des conflits. Plus il y a égalité, plus il y a confusion, concurrence et conflit. L’harmonie vient de l’acceptation et de l’épanouissement de la différence de l’autre et non du nivellement. Il y a aujourd’hui prédominance d’un niveau moyen ou tout est égal et indifférent. C’est la victoire du quantitatif sur le qualitatif. L’uniformité n’est ici qu’une parodie matérielle de l’Unité et de la réalisation de soi.

Nos différences, de même que l’énergie ou la matière, se dilue et se fragmente toujours plus et devient donc de moins en moins utiles. L’industrie ou même l’architecture sont beaucoup plus dominés par la quantité que la qualité, la standardisation plutôt que la différence ou le changement. Toutes les villes vont bientôt se ressembler, se normaliser.

Nous sommes dans un processus de « dé-création » puisque l’objectif de la création était de séparer, de diviser et de distinguer. La vie, la croissance,le dynamisme, le mouvement découlent d’une distinction. La mort, l’immobilisme découlent de la suppression de la distinction et de l’identité. Il ne peut d’ailleurs se créer aucune combinaison intelligente si ce n’est entre choses distinctes et différentes…

La conscience de soi est spectatrice, juge et dans l’idéal, gestionnaire des fonctions extérieurs de l’individu et ouvre sur les réalités immuables. Ce n’est donc que du niveau intérieur de la conscience de soi que peuvent provenir les impulsions créatrices de monde. Nier le développement de la personnalité et de la conscience de soi est nier les capacités créatrices de l’homme et le sens de la vie. L’oeuvre de Dieu consiste à tirer l’ordre du désordre et non, comme le fait la matière, à réduire l’ordre au désordre. Le principe, en hébreu, Bereshith, est la puissance métaphysique qui donne la forme aux choses. C’est le point au centre du cercle, ce qui reflète la manière dont une forme est la cause de ses projections dans la matière. Dans la genèse, il est dit « Au commencement Dieu créa les cieux et la terre ». Bereshith est ici traduit par « Au commencement » mais pourrait aussi signifier « Dans le Principe » ou « Selon le principe ». La se pose la question de l´univers comme simple matérialité ou comme une communauté d’esprit aux yeux desquels la structure matérielle du Monde est subordonné aux âmes et aux intelligences qui en forme le principal contenu. Certains tombent dans le manichéisme pour qui ce monde est un enfer qui dissimule complètement Dieu à la conscience humaine.

Pour autant, selon l’auteur, l’ordre existe : le fini équilibre l’infini, la qualité équilibre la quantité et le microcosme équilibre le macrocosme et Dieu transcende ces polarités.

Certains philosophes affirment qu’une série sans commencement ne saurait avoir de fin, et vice-versa. Donc si le temps à un commencement, il a une fin, s’il n’a pas de commencement, il ne finira pas et est donc infini. D’autres défendent l’idée que des séries infinies peuvent avoir un début, c’est le cas en mathématique d’une série de nombres qui part de un (ou zéro) et qui se poursuit infiniment. C’est l’exemple d’une infinité qui part d’un point fixe. Cela pourrait être le cas de notre univers. Mais, sans compliquer les choses, le présent pourrait aussi être la fin d’une longueur infinie de passé… Du point de vue des religions, les valeurs spirituelles ne peuvent jouer un rôle cosmique que si l’homme en joue un. En ce sens, il est nécessaire que le monde soit fini pour que l’homme ne soit pas réduit à rien par rapport à lui. Ceci dit, la durée du temps peut être indépendante de la durée de notre monde. Plusieurs mondes finis se déroulant alors dans un temps infini ou du moins selon un continuum indéfiniment extensible.Le temps est infini parce qu’il ne dépend pas du monde matériel. Il ne subit pas la loi de l’entropie et reste identique à lui-même, parfait. Certains évoquent même l’idée que le Temps existait déjà quand Dieu a crée le monde même si le temps reste subordonné à l’Être…

Pour St Thomas, la création doit avoir le maximum possible de diversité pour correspondre à la puissance du créateur. Il doit donc y avoir multiplicité mais aussi variété, quantité mais aussi qualité. Les choix que fait un individu peuvent accélérer ou ralentir l’écoulement du temps. Que ce soit avant tout par un choix intelligent qui se réalise dans les individus particuliers ou par une descente ontologique inévitable, le temps s’écoule. Les formes, elles, n’ont aucun pouvoir de coordination ou de maintien qui pourrait assurer que leur manifestation dans la matière produira un cosmos et non un chaos. La forme est la cause et le modèle de l’ensemble des manifestations dans la matière et le temps.

L’explication de toute la série temporelle comme aboutissement d’une séquence réductrice qui divise les manifestations en quantités toujours moindres, implique que tous les types d’entités se déplacent et se remplacent de plus en plus fréquemment.

Le présent est lieu ou se rencontre deux flux égaux et opposés, qui produisent le futur à partir du passé et le passé à partir du futur. Il y a donc échange constant entre le passé et le futur. Le futur se forme à partir de ce qui est passé et tout ce qui est passé a une fois été futur. Il ne peut donc y avoir de futur sans passé et de passé sans futur. Cela plaide pour la notion de temps infini ou cyclique car le temps ne peut pas ne pas avoir de passé et ne peut donc pas débuter. Il faut forcement du passé pour construire l’avenir, c’est la loi de causalité. Les manifestations sont de plus en plus sujettes au changement et à l’instabilité au fur et à mesure que décroit leur relation à l’essence.

Alors que l’humanité possède un monde en commun, le monde perçu par chacun est une reconstruction personnelle unique de ce monde commun, selon une échelle personnelle de valeurs et de priorités. Si le moi s’identifie à l’extériorité, il est pleinement dépendant du temps. L’homme ajoute alors sa force à la force du temps et participe ainsi à l’accélération du temps. Les activités spirituelles de recherche de la vérité ne sont pas susceptibles d’une telle accélération. Cela parce que la saisie de la vérité dépend d’une causalité propre au niveau mental, non au niveau corporel. L’intériorité est hors du temps. Celui qui vit son intériorité souffre donc moins de la loi de l’entropie et de l’accélération du temps. L’action de l’homme intérieur s’exerce dans le temps sans pour autant y être soumis. Ceci dit en laissant moins de temps au mûrissement de l’intellect, l’accélération du temps dans notre société vide toujours davantage la vie humaine de tout contenu spirituel. Le fait de vivre plus longtemps est plus que contrebalancé par la réduction de la qualité de la vie et de sa durée absolue…

Les mathématiques permettent de mieux comprendre le monde.12 symbolise la plénitude, étant le produit de 3 et de 4 qui représentent respectivement les essences et le cosmos matériel ou le ciel et la terre. Le processus cyclique, l’entropie déterminent les périodes et les changements de l’histoire sur la base d´un principe mathématique. Tout comme la musique est déterminé par les règles de l’harmonie et du contrepoint, l’univers est déterminé par les mathématiques. Pour autant, il est tout a fait possible d’écouter de la musique sans connaitre la théorie musicale, néanmoins la structure théorique y est, qu’on l’a connaisse ou non. La connaissance du particulier n’est cependant possible que grâce à une connaissance sous-jacente de l’universel. Ce déterminisme des lois universelles ne nie pas, pour autant, la volonté libre de l’individu. Au contraire, l’étude des cycles universels présuppose cette volonté libre capable de s’ajuster à eux et de contrarier leurs effets négatifs.

Le principe de l’entropie nous indique donc un épuisement progressif des ressources de l’univers, sa dilution, sa dégénérescence progressive. Il y aura donc un temps ou l’univers totalement dilué et refroidi sera épuisé de son dynamisme et sans énergie tombera dans l’immobilité. Notre monde subit ces forces destructrices de l’entropie ce qui a pour conséquence la pollution et à l’épuisement des ressources. En même temps, il n’y a plus aucune possibilité que l’histoire prenne une autre direction car tous les changements culturels qui peuvent se produire et fournir les conditions d’un système alternatif de valeurs sont étouffés ou absorbés par le système existant.

Pour Platon, le monde est sauvé et restauré par Dieu chaque fois qu’il atteint les limites de la dissolution (Apocalypse). Le chaos implique une tension croissante entre le monde extérieur et l´ordre universel dont, en dépit de tout, il dépend. Dans la religion chrétienne, le diable est symbolisé par le 666, la croix par le 777 et Jésus par le 888. La croix symbolisant ici le sacrifice ou la mortification des possibilités inférieures de ce qui constitue la personnalité individuelle. Le diable étant l’union du pouvoir et d’une essentielle impuissance, Dieu, l’union du pouvoir et d’une essentielle puissance.

En conclusion, la modernité qui promeut le progrès sans fin se fonde idéologiquement sur la négation de la conception traditionnelle du temps. La conception moderne et linéaire du temps fait la promotion du toujours nouveau, du changement perpétuel mais superficiel. Connaitre les lois cycliques, permet à notre esprit de les synthétiser puis de les transcender.

 

S.D