Les entreprises humanistes

Docteur en psychologie, Jacques Lecomte est l’un des principaux experts français en psychologie positive. Auteur de plusieurs ouvrages, il a enseigné à l’université Paris Ouest Nanterre la défense ainsi qu’en sciences sociales. À travers ce livre de 460 pages paru en 2016 aux éditions Les Arènes, il présente une vision surprenante et bien documentée d’entreprises qui mettent l’homme et le bien commun au centre de leur système de valeur et de leur fonctionnement. Fondant son argumentation sur un ensemble d’exemples concret et précis l’auteur démontre qu’une structure capitalistique, a priori dénuée de philanthropie, peut  générer de la motivation personnelle et intrinsèque pour autant que le la direction sache appliquer un certains nombre de principes relationnels et organisationnels.

  • Motivation intrinsèque et extrinsèques en entreprise

Les composantes clés des deux types de motivations intra et extrinsèques au travail sont puissamment analysées ainsi que la situation de flux qui correspond à une mise en situation idéale (capacités personnelles & défi à relevé en phase). La perception de son job et également identifier comme facteur de motivation potentiel (percevoir son travail comme une vocation, vouloir faire carrière, ou seulement avoir un revenu).

Mais selon l’auteur la motivation au travail est avant tout personnelle, elle vient de chaque individu. C’est ce que tous les responsables devraient avoir en tête pour en conséquence générer des situations qui permettent aux collaborateurs de constater l’impact positif de leur travail sur ceux qui en bénéficient, ainsi que sur différents biens communs (santé,  environnement, eau…).

Sont ensuite aborder les aspects financiers et notamment l’effet des primes à la performance.

 

  • Confiance et coopération

Le bien-être au travail et l’épanouissement passe également par le développement personnel au travail point. Si un manager veut innover il doit avoir confiance en les idées de ses salariés. La clé de l’innovation réside donc dans l’importance accordée aux idées des salariés, dans ce cas l’innovation et gagnante et les salariés se sentent bien. Jacques L. Précise par la suite en quoi une vision uniforme, une pensée unique dans l’entreprise peut-être catastrophique.

Elle propose également d’améliorer la communication en instaurant un système critique de bienveillance par des décisions collectives.

La confiance diminue donc le turn-over, augmente la créativité et le bien-être.

De même la médiation est préférable à la conciliation ou au procès en termes de gestion de conflit, de gestion de la communication, de qualité d’écoute et d’empathie.

 

  • L’entreprise au service de la société

Une entreprise vertueuse doit savoir soutenir des initiatives exemplaires.

L’auteur explique le concept de pyramide de Braithwaite. Il s’agit de valoriser les initiatives en interne dans les entreprises par une sorte d’autorégulation imposée des entreprises considérant que l’autorégulation n’est pas nécessairement une option plus douce que la contrainte publique.

Le concept s’articule autour de deux pyramides d’idées : l’une de soutien des forces et l’autre de sanctions qui permettent dans un premier temps d’apporter le soutien aux initiatives et aux actions exemplaires par l’utilisation de la pyramide de soutien. Et seulement dans un deuxième temps si la première pyramide de soutien ne fonctionne, l’inspecteur utilise la pyramide de sanctions.

 

  • L’entreprise et la pauvreté dans le monde

La vraie compassion est plus que de jeter une pièce de monnaie à un mendiant. (…) Elle conduit à voir qu’un système qui produit des mendiants doit être restructurer. Martin Luther King.

C’est avec cette citation que l’auteur précise l’importance des entreprises dans la réduction de la pauvreté dans le monde. Il choisit des exemples concrets d’entreprises ayant œuvrées pour la réduction de la pauvreté dans le monde comme le lancement du microcrédit par Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix en 2006. Ou comme l’entreprise Essilor en Inde, coopérative française devenue numéro 1 des lunettes dans le monde en comprenant qu’il y avait dans le monde un réel besoin de base ; celui vital de prendre soin de sa vue. En effet l’OMS à chiffrer à 285 million le nombre de personnes ayant des déficiences visuelles. En Inde seul 7 % de la population ont des lunettes. L’entreprise crée alors une chaîne de production à bas coût de lunettes avec un circuit de distribution en camionnette, une sorte de cabinet opticien itinérant.

Auteur explique en quoi la stratégie du social-business est différente de l’humanitaire. Il précise également en quoi le concept d’économie sociale et solidaire et plus résistant aux crises que l’économie classique. Il prend également un autre exemple vertueux ; celui de Mandragon qui développe une activité d’industrie, de distribution, d’enseignement recherche autour de 10 principes clés dont l’inter-coopération des activités et une organisation démocratique.

Il établit enfin une liste de plusieurs autres concepts d’entreprise socialement vertueuse.

 

  • Réduire les risques de catastrophes

On ne subit pas l’avenir, on le fait. Georges Bernanos.

Toute catastrophe ou dysfonctionnement majeur est lié à un problème de communication. Pourquoi ? Car ces catastrophes sont généralement prévisibles.
Une organisation fiable reposerait sur trois principes :

  • Un effacement temporaire de la hiérarchie nécessaire
  • Un débat contradictoire plutôt qu’une décision rapide
  • La non punition des erreurs, la sanction pénale est un obstacle à la sécurité

De nombreuses entreprises arrivent d’associer harmonieusement convictions et efficacité si les convictions sont authentiques.

 

  • Œuvrer pour l’environnement

Jacques L. évoque en fin de livre les certifications et les différentes approches normatives environnementales (ISO 14 001, …).

Il nous éclaire également sur la nouvelle tendance qui existe aujourd’hui et qui consiste à créer des partenariats, des alliances entre des entreprises et des associations environnementales de type ONG par exemple.

Enfin sont présentés 3 études de cas d’expérience de décontamination que l’auteur caractérise comme des succès écologique :

  • L’expérience de décontamination nucléaire de Rocky flat
  • L’opération d’ampleur dépollution du Rhin
  • La restauration de la couche d’ozone

 

Ce qui m’a plu d’un point de vue méthode :

  • Des « résumons-nous » à chaque fin de partie qui apporte l’essentiel des idées en quelques phrases.
  • Un plan en 4 grandes parties bien construit qui fait le tour de la question des facteurs de bien-être et de la motivation en entreprise.
  • Un ensemble de concepts managériaux mis à l’épreuve d’études de cas documentées.
  • La place de la coopération par rapport à la compétition dans un système capitalistique.

Ce qui manque à l’analyse :

  • Les conséquences capitalistiques de toute entreprise nécessaires à leur survie sont assez peu mises à l’épreuve, place de l’appât du gain face au bien commun ou face à une situation de dérive financière difficile.

 

Rodolphe Proucelle